Vivre au château

Généralités

 l nous faut ici reprendre quelques notions de base du vocabulaire médiéval, mais qui perdurent, au Val d'Aoste plus qu'ailleurs, jusqu'au XIXe siècle, si on en croît l'Inventaire des Archives de Challant. Un château, ici le château Passerin d'Entrèves et de Courmayeur à Châtillon, anciennement propriété des Challant, n'est pas seulement une construction, entourée d'un parc et d'un jardin, comme nous la pouvons percevoir aujourd'hui.

Plan de masse du château et du parc Passerin d'Entrèves à Châtillon, au moment de travaux d'adaptation et de remise en état du début du XIXe siècle (plan et photo collection privée).

Initialement, avant même le château, il s'agit d'un fief, et d'une seigneurie. En tant que fief, il est concédé par un seigneur suzerain, "à temps" (pour une durée déterminée) ou "à toujours" (pour une durée indeterminée, et de manière transmissible à ses successeurs), à un vassal, à qui le bien (fief et seigneurie) doit fournir un revenu suffisant pour qu'il rende, ou continue de rendre service, ou soit remercié d'un service rendu à son seigneur. Il s'agit en général de services de nature militaire, ou bien liés à la très haute administration ou à la diplomatie, ou bien encore liés à la cour et à ses fonctions, ou bien, parfois même, liés à la reconnaissance d'une simple proximité et amitié. Si le service s'arrête, ou si le vassal trahit, change de camp, ou ne veut plus rendre service, ou ne peut pas le faire avoir à un héritier reconnu par son suzerain, héritier mâle en général, le fief peut être repris par le suzerain. Il ne s'agit en aucun cas d'une propriété au sens contemporain du terme (qui n'entre en vigueur de manière massive dans les terres des Savoie que au cours du XIXe siècle).

Parfois, il peut s'agir d'une concession moyennant finances. Le cas s'est présenté à Châtillon, non pour cause de traîtrise, mais parce qu'à sa mort, en 1361, Boniface de Challant, seigneur de Châtillon, n'a pas d'héritier mâle. Le comte de Savoie reprend alors Châtillon, qu'il cède à nouveau au neuveu de Boniface, Yblet, fils de sa soeur, heureusement mariée dans une autre branche de la même famille de Challant. Yblet de Challant relève le fief ex manu domini en 1366, moyennant la somme de 8000 florins, ce qui est au passage très cher, assez pour qu'on mesure l'importance et la valeur, dès cette époque, des fief et seigneurie de Châtillon (Pour avoir une idée du prix: (1) Liste de prix au Moyen-âge ; (2) "Entre 1365 et 1372 (...), le florin oscille de 65 à 70 sous, suivant les denrées. Pour les salaires il vaut en moyenne 67 sous. S'il achète du blé, ou du porc, ou de la viande, ou du vin, denrées pour lesquelles le florin est coté 68 sous et plus, Bencienni [del Chiaro, menuisier (maestro di legname)], gagnera 1 à 3 sous par pièce, 2 lires peut-être en tout" in La Roncière Charles-Marie de, Prix et salaires à Florence au XIVe siècle (1280-1380), Rome : École Française de Rome, 1982, p. 293). On comprend bien, par ce cas de figure, qu'il ne s'agit pas d'une concession de propriété pleine et entière, même si le fief est habituellement transmis de père en fils. Tenir un fief, c'est d'ailleurs en faire régulièrement reconnaissance au seigneur suzerain. De fait c'est la première mention que l'on ait du château de Châtillon : en 1242, les frères Challant Godefroi, Aymon et Boson passent reconnaissance au comte de Savoie, Amédée IV, pour la seigneurie et le château de Châtillon, ainsi que pour le château de Rives, toujours à Châtillon, lors des Audiences Générales (voir par exemple Joseph-Gabriel Rivolin, Les Valdôtains et la maison de Savoie: un aperçu historique, Aoste, 2015, p. 6 et 7 ; voir encore Inventaire des Archives de Challant, VOLUME 87, AOSTA, CONSEGNAMENTI DIVERSI, Mazzo 1°, 1242-1756, 2, 1242).

Celui qui tient un fief, donc une seigneurie, devient de fait seigneur lui même, mais n'a pas forcément le droit de créer des nobles à son tour : je n'ai pas relevé d'anoblissement direct effectué par les Challant de quelque branche que ce soit, au cours des 800 ans suivis par les archives. Une seigneurie se compose en fait de tous les droits (et devoirs) qui accompagnent le fief, dont on comprend bien que l'objectif est, initialement, d'assurer, un revenu aux hommes utiles au suzerain, afin qu'ils n'aient pas besoin de travailler et se consacrent exclusivement à leur tâche, dans notre cas auprès des comtes de Savoie, ou en tout cas à leur seul service. Et il s'agit également d'y assurer l'ordre, l'administration et la justice, au nom du suzerain, et dans le cas de Châtillon, du souverain, duc de Savoie.

Carte des seigneuries au Val d'Aoste au XIVe siècle, avec celle de Châtillon, appartenant aux Challant, mise en évidence. D'après Corni Francesco, Segni di Pietra, torri, castelli, manieri e residenze della Valle d'Aosta, Associazione Forte di Bard, Saint-Christophe, 2008, p.25.

La carte ci-dessus met en évidence les caractéristiques territoriales des seigneuries des différentes branches des Challant, contrôlant la partie est de la vallée centrale, d'altitude un peu plus basse, dans la "plaine" centrale de la vallée principale, donc pas mal plus fertile, et donc plus riche que d'autres territoires de la vallée. Il s'agit également du plus grand territoire "privé" du Val d'Aoste, les autres seigneuries étant plus réduites en taille comme en richesse. Enfin, cette carte nous montre une grande continuité dans leur territoire, ensemble, puisque les chatellenies de Bard et de Montjovet, la vicomté d'Aoste (avant 1295) puis le gouvernorat d'Aoste, et même la chatellenie de Châtelargent, la Valdigne, et parfois la région entière, sont tenus par les Challant pour les comtes puis ducs de Savoie, et donnent une grande unité et homogénéité aux territoires qu'ils contrôlent, à condition qu'ils restent unis.

Rappellons aussi que pour un noble travailler en personne, en Savoie comme en France, et en général en Italie du Nord, c'est "déroger", et donc perdre de facto sa noblesse. Vignet des Etoles, gouverneur de la Vallée d'Aoste au XVIIIe siècle signale quelques cas, et au moins un à Châtillon, de familles nobles ruinées, et donc contraintes de déroger. Les seigneuries sont donc leur source de revenu, sinon principale, du moins privilégiée pour le Val d'Aoste, même si des études récentes tendent à très largement nuancer ce constat (Voir Beatrice del Bo, «A proposito della rendita signorile e delle sue scritture. Le castellanie degli Challant nella Valle d’Aosta (secc. XIV-XV)», Studi di storia medioevale e di diplomatica - Nuova Serie, (2), 2020, p. 243–261).

Si on reprend le bilan "statistique" sur les Challant qui nous intéressent (ce bilan repose sur l'ouvrage de Pascal Durandard, Histoire généalogique de la Maison de Challant, Centre Généalogique de Savoie, Annecy-le-Vieux, 2019) : il y a 350 Challant en tout, dont seulement 12 morts en bas âge ou morts jeunes (soit un taux de mortalité infantile de 46/1000 contre environ 250/1000 en population générale sur l'ensemble de la période, ce qui traduit sans doute le bien-être de la famille). Parmi les survivants, 188 femmes et 162 hommes, partagés en 9 branches, chacune représentant entre 6% et 22% de l'effectif familial total. Parmi les femmes Challant, 100 le sont par naissance, et 88 le deviennent par mariage. Parmi les Challant, on compte 28 membres du clergé, dont 5 femmes et 23 hommes. Le château de Châtillon a été tenu par 5 des neuf branches Challant, changeant régulièrement de mains au cours de l'histoire mouvementée de la famille. Parmi les Challant, 25 (7,1%) sont directement "de Châtillon", soit 19 "seigneurs de Châtillon", 6 "barons de Châtillon", et 4 "dames de Châtillon". Il faut leur ajouter les seigneurs de Châtillon de la deuxième moitié du XVIIIe siècle (François Maurice Grégoire et Jules Charles Maurice Hyacinthe de Challant) qui ne l'indiquent plus dans leur titulature, et insistent sur le comté de Challant, regagné après un long procès en 1696. Il s'agit là des "titulaires" de la seigneurie, même si les enfants de ces branches sont bien plus nombreux. D'après la documentation connue, ils couvrent une période qui va de 1177 à 1795.

Sources

 n compte dans l'Inventaire des Archives de Challant, publié par Joseph-César Perrin à partir de 1974, principale source pour raconter l'histoire de cette famille, comme l'histoire du château et de la communauté de Châtillon, où même de celle du Val d'Aoste, 9815 articles, décrivant chacun un ou plusieurs documents d'archives. Celà en fait une des sources les plus riches, dans l'absolu, pour raconter l'histoire des familles nobles entre moyen-âge et XIXe siècle, et un unicum très riche et exceptionnel pour le Val d'Aoste. L'exploration de cet inventaire nous permet d'autres décomptes intéressants pour l'histoire du château de Châtillon. L'inventaire compte ainsi 1528 articles concernant directement ou indirectement Châtillon (soit presque 16% du total), sur lesquels 41 articles relèvent de la gestion, comptable ou non, de la châtellenie, et 135 de la comptabilité générale. Une part non négligeable des autres articles, non encore précisément décomptés, porte sur des actes de la comptabilité du quotidien: quittances, reçus, notes, ventes, achats, prêts, emprunts, successions... De quoi nous permettre un suivi assez précis de la vie au château au cours des huit siècles de son histoire.

Ces archives ont été conservées, tour à tour, au sens propre comme au sens figuré, dans les différents châteaux des branches dominantes de la famille, enfermés dans des coffres en bois, armoires et autres contenants, rangés par fief et par thème, et munis d'inventaires. Des pièces leur étaient destinées, comme le "cabinet des droits" au château d'Aymavilles (avant 1450), le "cabinet de la chapelle" dans le château d'Issogne (avant 1618), une pièce très sécurisée du château de Verrès (encore au XVIIe siècle), ou la "chambre dorée" du château de Châtillon (XVIIe et XVIIIe siècles), probablement l'actuelle chambre de la comtesse (dite "chambre jaune"), au deuxième étage de l'ancien donjon du château. Bien que le local dénommé "salle des archives" (voir ci dessous), toujours à Châtillon, ait également contenu les archives Challant, ce n'est probablement que depuis le XIXe siècle, et l'avènement des Passerin d'Entrèves et de Courmayeur. Ce devait être auparavant une salle de prestige, comme en attestent les fresques du XIVe siècle qui en ornent les murs, contemporaines de celles du château de Fénis. Il y a peu de chances qu'on décore avec faste un lieu destiné à stocker de vieux documents, même prestigieux! Et le mobilier de la pièce actuelle est plutôt de la moitié du XIXe que du XVIIIe siècle.

Deux images de l'actuelle "Salle des Archives" du château de Châtillon, où étaient conservées jusqu'aux années 1970 les archives du fonds Challant, avant d'être versées aux Archives Historiques Régionales, dont elles sont le coeur, à Aoste (photo collection privée).

Tous les personnages de la famille, et leur époque, ne sont pas toujours bien "représentés" dans cet Inventaire. On en comprendra les logiques facilement. Le première logique est que plus on s'éloigne de nous dans le temps, moins la documentation qui nous est parvenue est nombreuse, précise et détaillée.

On en sait donc ainsi fort peu de Boson III de Challant, premier seigneur de Châtillon (7 documents dans les archives, le plus souvent indirects, mais aucun dans les archives Challant), que l'on suit pourtant sur 63 ans, entre son entrée en possession du titre de Vicomte d'Aoste et de seigneur de Châtillon, et la date présumée de sa mort, en 1240, mais avec des trous documentaires béants.

On en sait bien davantage sur René, 5ème comte de Challant, seigneur de Châtillon, qui compte, toutes archives confondues, 830 documents d'archives qui le concernent de près ou d'un peu plus loin, dans les archives Challant ou régionales, au Val d'Aoste, locales en Suisse, dans le canton de Neuchâtel, à Valangin, à Turin et à Chambery, dans les archives de l'état de Savoie, mais aussi aux Archives Nationales françaises, par exemple comme pensionné du roi de France, dans les Archives espagnoles ou impériales de Simancas, comme dans celles de Vienne, comme pensionné de Charles Quint, Maréchal de Savoie, Lieutenant Général du Duc de Savoie, ou diplomate de premier rang européen... Il présente quand même moins d'intérêt pour la vie à Châtillon, puisque le château n'est cité que 45 fois (soit dans 5,4 % des documents d'archives qui concernent René de Challant).

Enfin, les comtes (et les barons, écuyers, chevaliers...) de Challant du XVIIIe siècle et leurs dames, filles et épouses, sont très documentés : 4210 documents d'archive concernent les générations comprises entre 1700 et 1800, soit 43% du total de la documentation. Mais plus nombreuses et entrant dans beaucoup plus de détails, ces pièces d'archive n'en sont pas forcément plus constructives, en tout cas pour notre propos.

Une autre logique à l'oeuvre dans notre documentation, et qui en modifie la teneur, c'est celle de l'importance des rôles des personnages étudiés. Même si tous les Challant ont joué un ou des rôles importants, dans le Val d'Aoste, à la cour des Savoie comme ailleurs, l'empreinte laissée par chacun n'est pas la même. Et les archives de Challant (comme le travail des historiens) privilégient ainsi les personnages les plus importants au détriment des autres. Si Châtillon est au coeur des archives entre 1242 (première mention) et la fin du XVIe siècle, il perd de son importance quand il est repris par les barons de Fénis puis de Châtillon, seigneurs de Challant tout de même, mais de second rang dans la hiérarchie familiale. Ce n'est qu'après le milieu du XVIIIe siècle que cette branche de la famille, et donc Châtillon, recouvre de son importance, et une présence de premier plan deans les archives.

Enfin, une des difficultés de ces archives, et donc pour bâtir l'histoire du Château de Châtillon, c'est que à la paléographie, pas toujours simple et très variée, vient s'ajouter la barrière des langues utilisées. L'essentiel de la documentation originale est en français, ancien, parfois en latin, médiéval, parfois en italien, ancien lui aussi. Mais il n'est pas rare d'y trouver de l'espagnol, des impériaux de Charles Quint, du portugais, de Béatrice, duchesse de Savoie, et de Mencie, sa cousine, épouse de René de Challant, et souvent de l'allemand, ancien et suisse, pour des fiefs tenus dans les différents cantons suisses, particulièrement celui de Valangin, détenu par Philibert, puis surtout René de Challant et ses filles. Par ailleurs, les inventaires successifs qui ont pu en être faits sont en français pour les plus anciens, mais en italien pour le plus récent, avec souvent des mélanges de langue entre les différents niveaux d'analyse, ce qui complique encore l'exploitation de ces archives. Cette approche, polyglotte et polychrone, requiert de l'historien et de l'archiviste de grandes capacités d'adaptation.

Le Moyen-Âge

 ur la partie médiévale, et un peu plus, des documents décrits dans l'Inventaire des Archives de Challant, on compte, en première approche, sans aller jusqu'aux documents, 25 mentions du mot chapon (pluriel ou singulier), 16 du mot perdrix, 13 de fromages, et toutes sortes d'autres marchandises (seigle, bled, orge, froment, poules, grives, vin, sangliers, chamois, porcs, herbages divers...), dues aux seigneurs de Challant, et qui sont, au moins en partie, revendues, comme en attestent, à mon hypothèse, les fresques peintes dans les lunettes du château Challant d'Issogne. Cela explique la livrée de certains marchands (vêtements aux couleurs de la famille Challant), puisque c'est bien la maison de Challant qui revend ce que le château lui rapporte. Au passage, c'est probablement comme ça que le seigneur transforme les impôts payés en nature par les villageois en numéraire, monnaie sonnante et trébuchante, étape fondamentale avant leur éventuelle transmission ou leur dépense.

Lunette peintes à fresque, représentant la cuisson, la transformation et la vente de diverses denrées, située dans la galerie extérieure au rez-de-cour du château d'Issogne, au Val d'Aoste. Voulues par le prieur de Saint-Ours, à Aoste, Georges de Challant, ces lunettes furent peintes entre 1490 et 1510 par un certain maître Colin, probablement d'origine lyonnaise (photo collection privée).

Cela explique aussi la présence d'une lunette "militaire", puisque celui qui ne s'aquitte pas, comme il le doit, de ses redevances, encourt alors le courroux du seigneur, et donc l'intervention de sa force armée. Par ailleurs, le fait que cette force armée soit au repos, avec toutes les anecdotes que l'on rapporte sur cette représentation (jeux d'argent, prostituée...), démontre à l'évidence que le comté est en paix et que les redevances rentrent bien, signe de bonnes et stables relations entre le seigneur et ses sujets. Cela m'apparaît comme l'affirmation fondamentale du pouvoir du seigneur sur ses sujets, et comme l'accomplissement de son devoir, après les presque cinquante ans de troubles à partir du milieu du XVe siècle, d'ordre militaire, politique ou juridique, liés au passage du comté de Challant d'une branche de la famille dans l'autre.

Lunette peinte à fresque, représentant des militaires au repos, située dans la galerie extérieure au rez-de-cour du château d'Issogne, au Val d'Aoste. Voulues par le prieur de Saint-Ours, à Aoste, Georges de Challant, ces lunettes furent peintes entre 1490 et 1510 par un certain maître Colin, probablement d'origine lyonnaise (photo collection privée).

Ceci étant dit, il n'est pas facile de faire un bilan financier, ou du moins économique, de la châtellenie de Châtillon comme des autres châtellenies des Challant. Pour en mesurer l'apport, il faudrait pouvoir mesurer en quoi consiste la totalité des revenus des Challant en général, et plus spécifiquement de la branche sise à Châtillon, selon les époques. Il faudrait ensuite mesurer quelle est la part des revenus spécifiques de Châtillon, dans cet ensemble plus général. Cette tâche semble vouée, pour le moment, à l'échec, faute de sources précises, tant sur le patrimoine Challant dans son ensemble que sur le bilan économique et financier de la seigneurie de Châtillon en particulier. Le meilleur essai dans ce domaine est celui de Beatrice del Bo, dans "La rente seigneuriale et ses écrits: les châtellenies des Challant au Val d'Aoste (XIVe et XVe siècles)" (traduction). Toutes les considérations que nous ferons dans les paragraphes suivants reprennent ou s'inspirent de ce très bel et très utile article.

Sur l'ensemble des archives de la famille Challant (9815 articles donc), on compte 1528 pièces concernant Châtillon, de près ou de loin. Ces notices d'archives, dans leur vocabulaire général (comptes, monnaies, règlements divers...), 267 documents (registres, carnets, cahiers, ensemble de pièces ou pièces esseulées...) semblent être d'ordre économique, fiscal ou financier, aptes à nous permettre d'approfondir cette problématique. Beatrice Del Bo nous indique que "dans cet ensemble de documents [NDT: Toutes les archives Challant], qui s’étend jusqu’au début du XIXe siècle, [seule] une petite partie concerne la gestion économique des châtellenies, en particulier les volumes 70, 105-106 et 172. Une série de comptes des châtellenies de Châtillon (1439, 1443, 1457, 1467-1469, 1478-1481, 1483-1484, 1490-91) et d’Ussel et Saint-Marcel (1477-1483, 1485-1486), datant du XVe siècle, constitue la base documentaire pour réfléchir aux revenus et à la rentabilité des châtellenies Challant, accompagnée de l’analyse de certaines chartes de franchise" (Voir article déjà cité, Beatrice del Bo, «A proposito della rendita signorile e delle sue scritture. Le castellanie degli Challant nella Valle d’Aosta (secc. XIV-XV)», Studi di storia medioevale e di diplomatica - Nuova Serie, (2), 2020, p. 243–261). D'autres comptes ou éléments de comptabilité portent sur le XVIe siècle : j'en décompte 97 sur le XVIe siècle, en relation avec René de Challant, détenteur de la seigneurie de Châtillon jusqu'en 1565, et ses héritiers directs. Après une période un peu confuse, du moins en matière d'archives, ce n'est qu'au milieu du XVIIIème siècle qu'on retrouve une plus grande facilité de lecture dans la documentation, mais aussi une plus grande complexité des informations: documents comptables du quotidien (billets de bouchers, de tailleurs d'habits, de chausseurs...), quelques récapitulations (cahiers de comptes, bilans, inventaires après décès...) mais plus du tout la belle régularité des comptes de châtellenie comme au cours du XVe et du XVIe siècle.

Autre forme de revenu indirect, à Châtillon, le seigneur touche un droit sur ceux qui participent au marché (le mardi puis le samedi, au cours du XVIIIe me semble-t-il), des péages des marchands qui passent par le village, sur la grande route des Gaules, des droits sur ce qui se fait dans les forges, se moût dans les moulins, se cuit dans les fours, se cueille ou se chasse dans les bois, s'extrait des mines d'or et d'argent (sous le strict contrôle du souverain), de fer, de manganèse, de cuivre, ou même de pierre ollaire, utilisée pour la fabrique des poëles et de meules, ou encore de ce qui se fabrique dans les manufactures de clous. Je ne peux et ne prétends tout documenter ici, mais l'Inventaire des Archives de Challant comporte des références à toutes sortes de documents sur les taxes, redevances et tributs qui reviennent de droit au seigneur de Châtillon. On trouve ainsi, parmi beaucoup d'autres, un document sans date (mais relevant du XVe siècle), intitulé "Livre des rentes, cens, servis, usages, tailles, etc. dus aux seigneurs de Challant par leurs sujets de Brusson, d’Ayas et de la châtellenie de Châtillon" (voir Inventaire des Archives de Challant, volume 340, pièce 19).

Le château est ainsi un lieu de concentration de richesses, mais aussi de production. Les revenus "indirects" s'accompagnent de beaucoup de revenus directs, liés à l'exploitation des terres du château directement par ses employés, ou par des corvées imposées aux villageois. Je n'en ai pas trouvé de trace utilisable dans les inventaires d'archives, sinon peut-être sous forme de franchises à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe. Ce qui me laisse penser qu'une bonne partie des ressources directes de propriété des Challant à Châtillon sont données "à ferme", c'est-à-dire louées moyennant finances, aux villageois ou à d'autres.

Il arrive même par exemple que les Challant entre eux hypothèquent leurs biens les uns aux autres, afin d'en tirer un revenu immédiat, en cédant l'exploitation des droits de leurs fiefs. Ainsi, les 15 et 19 février 1310, on trouve deux textes passionnants : "1310, 15 février, Ipoteca dei signori Gottofredo, Pietro e Bonifacio, padre e figliuoli, signori di Cly, verso li signori Pietro e Bonifacio, signori di Castiglione, del castello e luogo, giurisdizione, beni e redditi di Cly e delle parrocchie dal medesimo dipendenti per anni 8, per la somma di lire 2000 moneta usuale "(voir Inventaire des Archives de Challant, volume 212, pièce 2). Tout est ici "loué" pour une somme payée en une seule fois. Et bien entendu, afin que la population suive, on trouve un document de complément : " 1310, 19 février, Ordine delli signori Gottofredo, Pietro e Bonifacio, signori di Cly, agli uomini del detto mandamento e giurisdizione, di riconoscere li signori Pietro e Bonifacio, padre e figlio signori di Castiglione, pendente il tempo che li medesimi terranno in ipoteca il detto mandamento " (voir Inventaire des Archives de Challant, volume 61, pièce 29). On mesure au passage ici la complexité du stockage, du cataloguage et de l'exploitation des archives Challant, puisque ces deux documents, de nature proche, sont dans des volumes, des séries, et sous des cotes totalement disjointes.

Ancien corps de ferme des Challant, au pied du château de Châtillon, mais désormais (depuis le XXe siècle) détaché de la propriété principale (photo collection privée).

Quand ils ne sont pas affermés, hypothéqués ou loués, les châteaux sont le plus souvent aux mains de châtelains, qui les gèrent au nom du seigneur, moyennant rétribution de type salaire (tant de livres par mois) et non forfaitaires (tant pour 4 ans d'exploitation). Dans ce cas là, ils doivent rendre des comptes, payer les frais du seigneur sur demande, accueillir le souverain, s'il vient à passer par le château, au nom du seigneur des lieux, et le prendre en charge ainsi que les gentilshommes de sa cour. Et bien entendu, de manière annuelle ou bi-annuelle, rendre des comptes au seigneur. Il serait fastidieux de les traiter tous ici, mais le plus ancien compte qu'il me semble avoir trouvé, parmi les "Conti resi dalli castellani di quanto avevano esatto tanto per li annui censi in granaglie ed in denari, che per li bandi e pene dovute alli signori conti di Challant e dipendenti dalli loro feudi di Challant, Castiglione e Verrès" est celui de 1439, "Compte de noble Pierre Girod, châtelain de Châtillon". Il est suivi par d'autres, en 1448 (François d’Introd), 1457 (Pierre Tollen), 1469 (Pierre de Dompno), 1478-79 (Guillaume du Châtelard), 1480, 1481 et 1484 (Jean Valluch pour les trois), 1483 (Jean Jans), 1490 (Jacques Carrerii), avec plus loin, le "compte sommaire de Philibert Rosset du mandement de Châtillon", en 1495, plus un autre de Jacques Carrerii, châtelain de Châtillon, sans date, mais qui doit dater de la même période (voir Inventaire des Archives Challant, volume 136, pièce1). Et puis, j'ai trouvé sympathique et non anodin que dans la même pièce d'archive on trouve, sans date mais également d'une époque proche, un "compte du vin acheté par Pierre Tholini pour le château de Châtillon". Ce qui nous montre au passage que malgré les évènements (guerre entre branches de la famille, et changement de branche ; mise en siège du château de Châtillon; prise du château et capture de Catherine de Challant...), une certaine continuité est assurée, et que la comptabilité est suivie d'assez près par les Challant à Châtillon, quelque soit leur branche.

Du point de vue des villageois, il ne faut jamais perdre de vue qu'au delà des impôts seigneuriaux, ils devaient aussi payer les impôts du duché (Conférence de Laurent Périllat à l'académie Salésienne en mai 2023) ce qui rendait sans doute la superposition de tous ces droits assez lourde. La vie peut d'ailleurs s'averer assez chère, comme quelques listes de prix nous le démontrent. Le plus important des impôts directs, à partir de 1560 et le duc Charles Emmanuel Ier de Savoie, est la "taille", ordinaire et/ou extraordinaire, qui dépend des propriétés, et donne lieu à diverses cadastrations. Elle se paye par "quartier" soit trimestre (quart de l'année), mais dans certaines périodes et dans certaines régions on finit par payer 19 quartiers par an!

A cet impôt direct sur la propriété, il faut ajouter ce qui est dû au seigneur. On n'achète pas, ne vend pas, ni n'hérite, sans que le seigneur y prenne sa part, les "laods et ventes". On trouve ainsi en 1518-1522 les "Comptes rendus par M. Pierre Lucat, châtelain du mandement de Châtillon, pour le très illustre et magnifique seigneur Renato, comte de Challant, de toutes les rentes et émoluments, obventions et laods dûs au dit seigneur des dépendants de la dite chatellenie du susdit mandement pour les années 1518, 1519, 1521, 1522" (Voir Inventaire des Archives Challant, volume 90, pièce 20). A Châtillon, ce qui est dû au seigneur, de manière normale ou exceptionnelle, est réglé, entre autres, par les "franchises". Il s'agit d'un "accord", entre seigneurs et communauté villageoise. On en trouve régulièrement des exemplaires, probablement adaptés aux réalités du temps, jusqu'à leur rachat définitif moyennant finances à la fin du XVIIIe siècle et début du XIXe. Le Volume 91 de l'Inventaire des Archives de Challant comporte ainsi, par exemple, une dizaine de dates ( 1288 pour les plus anciennes, puis 1311, 1368, 1436, 1457, 1479, 1519, 1578, 1707...) mais il semble que pour chaque nouveau seigneur de Châtillon elles soient rediscutées, remises en cause par les villageois, et imposées de nouveau par les Challant, jusqu'en 1798, le 18 avril, date à laquelle Gabriella Canalis de Cumiana, veuve de Challant, affranchit définitivement les villageois de Châtillon, moyennant finances.

Les villageois doivent aussi les ustensiles, décimes et dons gratuits, impôts à but militaire, pour assurer le fonctionnement des armées ou, pour le dernier, les grands évènements de la monarchie (mariages, baptêmes, couronnements, etc...). Un impôt équivalent existe aussi pour les villageois, en cas de mariage ou de dot à payer dans la famille des Challant-Châtillon. Et René de Challant, pris par les ennemis du duché par deux fois, fait payer une partie de ses rançons par les habitants de ses différents fiefs.

La capitation, sorte d'impôt sur le revenu, montre l'importance socio-économique de chacune des classes de la société villageoise. Et puis, n'oublions pas les impôts indirects, les gabelles, sur le sel, mais aussi sur le vin, les viandes, les poudres et salpêtres, etc.... Sur un sac de sel, 40% du prix représentait la taxe. C'était sans doute là un ancêtre de la TVA française, IVA en Italie. Il faut également ajouter les douanes, péages et autres octrois ducaux, puis royaux (en plus des péages seigneuriaux) qui assuraient des revenus non négligeables pour les villes et évidemment pour le duc puis roi des Etats de Savoie. Et il nous faut conclure cette longue liste d'impôts, par la dîme, un dixième des récoltes, traditionnellement dûe à l'église (voir une liste plus complète des impositions sur le site mrugala.net).

J'insiste ici sur l'importance des impôts des villageois, car le pouvoir seigneurial et le pouvoir comtal, puis ducal, puis royal, passent par les châteaux. D'une certaine manière, non exclusive (il y a au fur et à mesure du moyen-âge puis de l'époque moderne d'autres autorités, mestraux, baillis, châtelains directs des Savoie...), le seigneur d'un lieu reste le représentant du pouvoir central, et en tant que tel rend, au moins en partie, la justice (comme dans la salle du trône du château d'Issogne), gère l'administration, et réunit également une partie des impôts, souvent en nature, avant de les transmettre plus haut, en argent. Il est donc un rouage essentiel entre l'état des Savoie, la seigneurie de Châtillon et ses villageois. Le château est un lieu de pouvoir et de regroupement pour une certain nombre de biens et de personnes.

Bien entendu, en ce lieu de concentration des richesses, le train de vie est bien supérieur à celui des autres valdôtains. Je n'ai ni les photos ni les images des périodes anciennes, aussi je mélangerai un peu les périodes plus récentes et mieux illustrées avec des informations plus anciennes.

La salle à manger actuelle du château, préparée pour le dîner des comtes, à gauche, et pour un dîner de 50 personnes, à droite (photo collection privée).

Si on remonte dans le temps, l'ouvrage intitulé Le château de Châtillon et l'inventaire de son mobilier (FG Frutaz, Aoste, 1899) nous donne la description de l'ensemble du mobilier du château de Châtillon en 1517. Mais simplement en se concentrant sur la page 160 et suivantes, on voit apparaitre brièvement le mobilier du château en 1565, et surtout l'ensemble des pièces d'argenterie qu'il contenait à l'époque, soit de longtemps, soit aménées de Lyon au cours des cinq dernières années de la vie de René de Challant. Certes, cette argenterie est financée avec les revenus de plusieurs de ses châteaux (nous avons les inventaires après décès très riches et détaillés d'Issogne, Aymavilles, Verrès, Bauffremont en Lorraine, et Vallengin près de Neuchâtel en Suisse), mais elle nous montre la quantité de richesse qui pouvait s'accumuler dans les châteaux de la plus prestigieuse des familles de la vallée, et sachant que Châtillon n'est pas le lieu préféré de résidence de René, qui n'y est presque jamais présent, préférant Issogne, Aymavilles ou Vallengin, autres de ses fiefs, valdôtains ou non. Malheureusement, après le pic de fortune atteint par René de Challant (1503-1565), la fortune des Challant s'est dispersée et amenuisée, ce qui fait qu'il ne reste aucune trace (à ma connaissance) de l'argenterie de cette génération là de la famille. Nous n'avons pu tracer (et avec très peu de précision), avec Paulette Taieb, que les livres qui migrent, de bibliothèque de descendant en bibliothèque de descendant, après la mort de René de Challant (voir le site Bibliothèques Nobiliaires Valdôtaines). Et nous savons, des usages du Moyen-Âge et de la Renaissance, qu'un personnage d'importance se déplace avec son mobilier, de château en château, ce qui fait qu'il ne nous en reste que fort peu, à Châtillon comme dans les autres châteaux des Challant.

Celui qu'il faut voir, pour se repérer, c'est peut-être le musée du château de Fénis, où sont répertoriés un certain nombre de meubles médiévaux, ou encore celui d'Issogne, où il reste également du mobilier du XVe siècle, ou bien du mobilier imité du style d'alors.

A la fois sièges et meubles de rangement, les "casse-panche" sont une partie importante des meubles médiévaux encore existant au Val d'Aoste. Ici, à gauche, celles de la chapelle du château d'Issogne, et à droite une probable imitation plus tardive dans la salle des archives du château de Châtillon. Photos collection privée.

De fait, le mobilier actuel du château de Châtillon ne reflète pas du tout celui du moyen-âge, (voir par exemple "Entre le banc et le feu" - Recherches introductives à l'étude du mobilier commun à la fin du Moyen Age (1280-1515)) mais plutôt la manière XIXe et XXe siècle d'habiter cet auguste lieu, que nous aborderons plus tard.

Sans doute faut-il imaginer le château comme un lieu meublé de coffres soit en bois et décor en bois, soit en bois et décor en métal (fleurs de lys, clous, divers éléments...), soit même en bois recouvert en cuir, et plus tardivement, des coffres en seul cuir, parfois travaillé (voir par exemple Meubles et objets d'antan, XVIe-XIXe siècles, Archives d'Indre-et-Loire, février 2018).

Dans l'inventaire du château de Châtillon en 1517 (puis 1565), édité par Frutaz, le mot coffre apparaît 78 fois, le mot buffet 20 fois (dont un très beau "buffet de noyer a menuserie"), le mot lit 165 fois, mais utilisé pour désigner non seulement le meuble lui même, mais aussi ses accessoires ("ciel de lit", "exchauffeur de lit", "couverte de litz de plumes"...). Les lits y sont le plus souvent à baldaquin, et décrits comme celui de Louise d'Aarberg, avec "le sorciel les gottières et le dociel dung lit de camp d'or faict à la main" (le ciel, les gouttières, le dossier). On y compte 52 fois le mot table, et 6 fois seulement les "terteaulx" (trétaux), souvent (20 fois) accompagnés du mot "banch" (banc). Il n'y a qu'une seule mention de "cheyses" (chaise), et deux d'"escabelles", ce qui fait donc du banc la référence principale en matière d'assise. Sont citées également deux "chières avec leurs sieches de cuyr" (chaire à siège en cuir), qui me paraissent correspondre tout à fait à la définition également, mais plutôt dans le style renaissance que dans le style médiéval. Au passage, le mot "cuyr" (cuir) n'apparaît que 9 fois, mais plutot sur de petits objets (bottines, bourses, tapisserie, carquois...).

Bois de lit et sa garniture (ciel, gouttières, dosseret) dans le château d'Issogne (Photo collection particulière)

Dans l'inventaire du château de Châtillon en 1642, édité par Enrico Tognan de manière plus précise que pour celui de 1517, le mobilier semble bien plus varié. Nous y trouvons 20 tables dont 19 en noyer, 12 coffres seulement, dont 3 en noyer, 2 en bois blanc, et 3 plus ou moins "usés". Un seul banc est présent, mais 9 "escabelles", et surtout 14 "chières" (sièges plus commodes avec accoudoirs), souvent dotés de coussins ou d'assises en tissus précieux. 5 "buffets", 2 "arches", et 5 "crédences" viennent compléter ce mobilier, décidément plus orné et riche : Châtillon est sorti du Moyen-Âge pour rentrer dans la Renaissance. Tapis (5), tapissons (3), et surtout tapisseries (8 dont 4 de cuir), avec leurs "spalliers" pour les accrocher (7) viennent compléter le décor et le rendre sans doute plus agréable et mieux isolé qu'il ne l'était auparavant. Enfin, 12 lits ou formes de lit, 4 garnitures de lit, 4 matelas, et 9 paillasses viennent compléter les commodités du château.

Il faut remarquer aussi que au moins cinq pièces sont chauffées par une cheminée, comme le trahissent les cinq paires de landiers présents dans la liste, complétées par "coultres" et "catalognes", couvertures en laine, pour conserver la chaleur.

Landiers anciens, probablement du XVIIe siècle. Image (fin XIXe), dans la cuisine du château d'Issogne, de la cheminée avec ses landiers. Photos collection privée.

L'image qui ressort de ce deuxième inventaire est sans doute plus élégante, et correspond à l'image que nous pouvons nous faire d'un château riche et prospère. Sans doute correspond elle mieux que celle donnée en 1517, car le château était probablement un peu négligé par la dynastie des Challant-Aymavilles, au profit de celui d'Issogne, largement préféré, et certainement plus prestigieux pour les propriétaires successifs de Châtillon, Jacques, Louis, Philibert, et enfin René de Challant.

Certains changements ne nous sont pas ou plus accessibles. On sait, comme c'est le cas au château "test" de Guédelon, par exemple, que les fenêtres d'un château-fort entre XIIe et XVe siècles ne sont pas en verre, mais plus probablement en parchemin huilé et ciré. Et Châtillon, pris d'assaut par les Challant Aymavilles autour de 1450, et renforcé pour ce faire par Pierre d'Introd et d'autres, présentait certainement ce type de fonction et donc d'ouverture.

Parchemin (chèvre) huilé et ciré sur une des fenêtres du château de Guédelon (Article dans l'Yonne Républicaine du 05/11/2018. Photo © Puisaye AGENCE)

Ce n'est que vers la fin du XVe siècle que les fenêtre à meneaux équipée de verre au plomb s'impose, en particulier dans les châteaux résidentiels privés, comme à Issogne.

Cour intérieure du château d'Issogne, datant des années 1490 à 1500, avec de grandes fenêtres à meneaux, et des verres au plomb en forme de losange (photo collection privée). Détail d'une photo (négatif noir et blanc, ramené au positif) d'une fenêtre à meneaux du château d'Issogne (photo Augusto Pedrini, second quart du XXe siècle, sous droit des Beni Culturali italiens)

Mais l'état de conservation actuel du château de Châtillon, dont toutes les fenêtres datent au plut tôt du XVIIIe siècle, ne nous permet pas de comprendre à quel type d'ouvertures on pouvait avoir à faire à l'époque, ni quel matériau était utilisé pour ses fenêtres.

 

 

 

 

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